La désintermédiation désigne le processus par lequel les agents économiques, notamment les entreprises et les ménages, accèdent directement au financement sur les marchés, sans passer par les intermédiaires financiers traditionnels comme les banques. Ce phénomène transforme profondément le fonctionnement du système financier en modifiant les canaux de financement et d’allocation des ressources.
Apparu avec l’essor des marchés de capitaux dans les années 1980, la désintermédiation est étroitement liée à la libéralisation financière, aux progrès technologiques et à la sophistication croissante des instruments financiers.
Dans un système intermédié, les banques jouent un rôle de pivot : elles collectent l’épargne des agents à capacité de financement pour la prêter aux agents à besoin de financement. Ce schéma repose sur le bilan bancaire et implique des risques de transformation, d’illiquidité ou d’insolvabilité.
La désintermédiation, à l’inverse, repose sur un financement direct via les marchés financiers : les entreprises émettent des actions ou des titres de créance (obligations) pour mobiliser des fonds. Cela suppose un accès aux marchés primaires, souvent réservé aux grandes entreprises ou aux institutions solides.
La désintermédiation peut prendre plusieurs formes :
Désintermédiation directe : un agent accède aux marchés sans passer par une banque. Exemple : une entreprise émet une obligation directement souscrite par des investisseurs institutionnels.
Désintermédiation indirecte : les banques continuent d'intervenir, mais en tant que prestataires de services (conseil, structuration), et non plus en tant que prêteurs. On parle alors de banque d’affaires plutôt que de banque de détail.
Désintermédiation numérique : plus récente, elle se développe avec les plateformes de crowdfunding, debt marketplaces ou fintech, qui mettent en relation prêteurs et emprunteurs sans intermédiation classique.
Plusieurs facteurs expliquent l’essor de la désintermédiation :
Paradoxalement, la désintermédiation s’accompagne parfois de re-intermédiation : de nouveaux acteurs (fonds de pension, hedge funds, assureurs) remplacent les banques dans leur rôle d’allocation de capital. Ces intermédiaires non-bancaires occupent désormais une place majeure dans le financement de l’économie.
La désintermédiation modifie en profondeur l’architecture du financement de l’économie. Si elle accroît la diversité des sources de financement et favorise l’efficience des marchés, elle pose aussi des défis en termes de régulation, de stabilité et d’inclusion. Elle souligne la transition d’un capitalisme bancaire vers un capitalisme de marché, et nécessite une régulation adaptée aux nouvelles formes de risques. Dans un contexte de digitalisation accélérée, la question de l’équilibre entre désintermédiation, innovation et sécurité reste centrale.