Le concept de bien public occupe une place centrale en économie publique et dans l’analyse des limites du marché dans la fourniture efficace de certains biens et services. Contrairement aux biens privés, les biens publics sont caractérisés par deux propriétés essentielles : la non-rivalité et la non-exclusion. Ces caractéristiques ont des conséquences profondes en matière d’allocation des ressources, de financement et d’intervention publique.
Comprendre ce qu’est un bien public permet de mieux cerner pourquoi certains biens ou services — comme l’éclairage public, la défense nationale ou l’environnement — ne peuvent pas être laissés à l’initiative exclusive du marché et nécessitent une prise en charge collective, souvent via l'État.
Un bien est dit non rival lorsque sa consommation par un individu ne diminue pas la quantité disponible pour les autres. Par exemple, le fait qu’une personne bénéficie de l’éclairage d’un lampadaire n’empêche pas une autre de profiter du même éclairage.
Cette propriété rend inutile la mise en place de mécanismes d’exclusion ou de tarification individualisée : l’usage est commun, sans congestion (du moins jusqu’à un certain point).
Un bien est dit non excluable lorsqu’il est techniquement ou économiquement difficile d’empêcher quelqu’un d’en profiter, même s’il ne paie pas. Cette caractéristique rend le financement par tarification difficile : il existe un risque de passager clandestin (free rider), c’est-à-dire que chacun espère bénéficier du bien sans en assumer le coût.
Ce comportement collectif peut aboutir à une sous-production du bien si aucun acteur ne prend en charge sa fourniture, d’où la nécessité d’une intervention extérieure.
La fourniture des biens publics pose plusieurs difficultés économiques :
Les économistes justifient l’intervention de l’État dans la fourniture de biens publics au nom de l’efficacité allocative et de la justice sociale. Le marché échouant à produire ces biens de manière optimale, il appartient aux pouvoirs publics de :
L’État agit ici comme un producteur ou régulateur visant à corriger une défaillance de marché.
En réalité, peu de biens sont purement publics. La plupart ont des degrés variables de non-rivalité ou de non-exclusion. On parle alors de :
La typologie permet d'adapter les politiques publiques selon les spécificités économiques et sociales du bien en question.
Un élément central dans la problématique des biens publics est le comportement de passager clandestin. Si chacun attend que les autres financent ou produisent le bien, il se peut qu’aucun ne le fasse. Ce dilemme est souvent représenté par le jeu du dilemme du prisonnier, où l’intérêt individuel entre en contradiction avec l’intérêt collectif.
Le dépassement de ce dilemme nécessite soit :
Les biens publics illustrent parfaitement la nécessité de penser l’économie au-delà des mécanismes de marché. Leur existence rappelle que certaines valeurs — comme la sécurité, l’accès à l’information, ou la protection de l’environnement — relèvent du collectif, de la solidarité, et du politique.
Comprendre les logiques propres aux biens publics permet de mieux saisir les enjeux contemporains liés à l’écologie, à la santé publique, à l’éducation ou au numérique, où les logiques de marché ne suffisent pas à assurer un accès équitable et durable.